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La maison hantée du comte d'Ourches, 1864

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La maison hantée du comte d'Ourches

En résumé

Nous sommes en janvier 1864 à Poitiers chez le comte Didier-Balthazar d'Ourches, propriétaire d'une belle maison de la rue Saint Paul où le septuagénaire séjourne finalement peu, préférant son hôtel particulier parisien. Sa soeur, Marguerite d'Ourches, veuve d'un baron d'empire, en est la véritable occupante.

D'ordinaire agréable, cette demeure est depuis peu le théâtre d'un rituel terrifiant. Chaque soir, vers 18h, des coups de feu résonnent dans la maison et à tous les étages des gens cognent aux portes et aux volets. Il n'y a pourtant aucun intrus dans la maison et les coups de feu ne laissent aucune trace.

Faute de pouvoir compter sur son frère, actuellement à Paris, Marguerite d'Ourches se rend au commissariat. Sans surprise, les policiers ne prennent pas vraiment au sérieux cette histoire invraisemblable, à plus forte raison venant d'elle ; les d'Ourches sont en effet des originaux, férus de spiritisme, la soeur se prétend même médium. Mais, eût égard au rang familial, les policiers promettent de tirer l'affaire au clair.

Une maison hantée sous surveillance

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La maison est placée sous surveillance. Postés à l'intérieur et à l'extérieur, des policiers sont à l'affût de toute canaille venu tourmenter son occupante. Vers 18h, un concert effrayant de détonations et de coups sur les portes et les volets donne raison à Marguerite d'Ourches. Les policiers retournent alors la maison dans tous les sens, mais ne trouvent personne. Et surtout, où sont les impacts, l'odeur de la poudre, la fumée... ? Un brigadier est même violemment sonné par un coup de feu tiré juste à côté de sa tête, sans rien ni personne autour de lui. Vers minuit le concert cesse enfin, laissant les policiers complètement hagards.

Appelés en renfort le jour suivant afin d'avoir un deuxième avis, les gendarmes finissent tout aussi hébétés.

La maison du comte d'Ourches devient dès lors célèbre à Poitiers. Chaque soir vers 18h, une foule s'amasse au pied de la résidence malgré le froid hivernal pour assister à ce concert surnaturel. Une foule de plus en plus considérable, la rue doit même finalement être sécurisée, les rassemblements ayant pris une ampleur ne pouvant plus être tolérée. Un piquet du 10ème chasseurs est mobilisé pour l'occasion, soit une cinquantaine de soldats d'élite dont la simple présence dissuade les agitateurs.

Mais chasser les badauds ne résout pas le problème. Les jours se suivent et les pétarades du soir continuent en dépit de la surveillance des forces de l'ordre et désormais de l'armée. En dépit aussi des experts les plus distingués défilant dans la maison pour résoudre cette énigme. L'hypothèse de dégagements gazeux est évoquée mais balayée par les experts en raison notamment de la nature du sol et de l'absence de souterrain.

Le surnaturel s'impose donc dans les esprits. D'aucuns accusent la médiumnité de Marguerite d'Ourches d'avoir attiré un esprit malveillant. D'autres pensent la maison hantée, en se basant notamment sur la présence naguère d'un cimetière peu ou prou en lieu et place de la maison. Jean Delorme, curé de Saint-Paul, envisage pour sa part la possession, il entreprend donc, avec l'accord de Marguerite d'Ourches, d'exorciser la maison. La demeure est ainsi parcourue par le prêtre lors d'une longue cérémonie où s'entremêlent prières et jets d'eau bénite et d'eau grégorienne, produisant pour seul résultat une brève accalmie. Cet exorcisme sera plusieurs fois répété, sans succès.

Entre-temps, un précédant troublant de maison hantée ou possédée est exhumé de deux ouvrages de Joseph Görres et Pierre Mamoris: La Mystique et Flagellum maleficorum. Au XIIIe siècle, à Poitiers, dans la rue Saint-Paul, un esprit malfaisant lançait des pierres, brisait des vitres et parfois même frappait les gens. Un témoin prestigieux en a alors rendu compte, Guillaume d'Auvergne, évêque de Paris. La maison fut également maintes fois exorcisée en vain. Et un beau jour, tout s'est arrêté.

La maison du comte d'Ourches suivra la même trajectoire. Un beau jour, le calme reviendra. L'affaire ne sera jamais élucidée et sombrera lentement dans l'oubli.

Didier-Balthazar d'Ourches

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Didier-Balthazar d'Ourches décédera le 1er mai 1867 dans son hôtel particulier parisien de la rue Salneuve dans le XVIIe arrondissement. Ironiquement à trois heures du matin, réputée l'heure du diable. Sans postérité, la famille d'Ourches s'éteindra avec lui, étant le dernier homme de la famille.

Obsédé par la mort, il léguera 25 000 francs à l'Académie de médecine afin de financer un concours devant récompenser le découvreur d'une méthode infaillible pour constater la mort, une somme considérable (un ouvrier gagne en moyenne une centaine de francs par mois) et pourtant une fraction seulement de sa fortune.

Une centaine de mémoires seront envoyés mais aucune méthode ne sera jugée infaillible. Conformément au testament, l'argent sera donc reversé à l'hôpital de Saint-Germain-en-Laye, en plus des 400 000 francs déjà légués par le comte à l'établissement. Un pavillon existant toujours et une rue de Saint-Germain-en-Laye seront nommés en son honneur.

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Publié par Jean-Charles Pouzet sur Caedes le 20-09-2024

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